ANORA & JUROR #2

En découvrant Anora au festival de Gand début octobre dernier, votre serviteur en est sorti ravi, content de l’inscrire au programme et à peu près certain que le film plairait à ses collègues. Plus, en laissant passer un peu de temps, le film avait même tendance à prendre un peu d’épaisseur, et en toute honnêteté, je ne voyais pas trop ce qu’on pourrait reprocher à un objet susceptible selon moi de mettre tout le monde d’accord.

Quelle ne fut pas ma surprise lorsqu’en écoutant le dernier numéro de Capture Mag, les illustres Stéphane Moïssakis et Julien Dupuy argumentaient leur hostilité au film, qu’ils trouvent ennuyeux, répétitif, creux et d’une « inefficacité narrative » patente. Rassurant quant à mon jugement critique et accessoirement mon état de santé mentale, ces deux piliers de Capture (et pour qui j’ai le plus grand respect) étaient tempérés par leurs collègues sur plateau.

Avant sa prise de parole, Julien Dupuy donne quelques prolégomènes : il n’aurait pas les armes pour juger de « ce genre de film » (autrement dit les films estampillés « d’auteur », terreau des cinémas dits « d’art et essai ») et son agacement lorsque des critiques « généralistes » parlent de cinéma « de genre » sans en posséder les codes ou en connaître l’Histoire.

Une idée qui me semble assez peu tenable, d’abord parce que selon moi tout cinéphile qui s’estime suffisamment aguerri pour formuler une pensée critique a le droit de donner son point de vue. Ensuite, un bon film devrait se suffire à lui-même, sans avoir à se mesurer à un système de références et de pré-requis. Ceci dit, il est indéniable que chaque personne aborde un film avec une certaine grille de lecture, imposée par sa cinéphilie, sa pratique, son histoire personnelle (exemple, un scénariste décryptera un film sous l’angle de sa mécanique scénaristique). Ainsi, le camarade Moïssakis se rapporte à un référentiel valorisant l’efficacité narrative visuelle, le dynamisme de la mise en scène de l’action et une grammaire cinématographique héritée d’un certain classicisme du cinéma américain (pas étonnant que l’art de Clint Eastwood trouve ses faveurs). Un type de cinéma d’ailleurs très souvent défendu également au sein de Transmission.

Là où je m’interroge c’est sur la difficulté pour un critique à changer d’échelle de valeurs, à juger un objet autre selon des critères autres, voire même de se retrouver désarmé, à cours d’arguments et de référentiel. Par exemple, serait-ce vraiment antinomique d’aimer à la fois Rambo de Ted Kotcheff (1982) et Scènes de la vie conjugale d’Ingmar Bergman (1974) pour leurs qualités propres, même si certaines qualités de l’un sont absentes chez l’autre et vice versa ?

Le débat est ouverte chère auditrice, cher auditeur cinéphile.

Retrouvez nous et partagez nous sur vos réseaux préférés :
Twitter Facebook Instagram
et sur toutes vos applis
Apple PodcastPodcast AddictPodCloudSpotify iTunes Youtube

00:00 – Intro
05:07 – ANORA de Sean Baker
20:14 – JUROR #2 de Clint Eastwood
31:52 – Conseils

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Close

Abonnez-vous à la newsletter

Saisissez votre adresse e-mail pour vous abonner à ce blog et recevoir une notification de chaque nouvel article par e-mail.

Suivez-NOUS sur Twitter